Les fêtes de fin d’année approchent. Pour l’occasion, voici quelques idées de livres à offrir ou à se faire offrir, qu’on soit d’humeur à étudier ou à se divertir…
Quelques essais d’aujourd’hui et d’hier pour des lectures sérieuses…
. Green IA : L’intelligence artificielle au service du climat de Gilles Babinet, Éditions Odile Jacob
Et si l’intelligence artificielle (IA), régulièrement dénoncée pour son empreinte carbone croissante, était au contraire la meilleure alliée de la transition environnementale ?
Le climat, mais aussi la biodiversité, sont des systèmes complexes, comprenant de multiples facteurs simultanés et séquentiels. Or, avance Gilles Babinet (voir son interview), la grande force de l’intelligence artificielle, c’est justement sa capacité à embrasser la complexité en effectuant des arbitrages à moindre coût.
Passant en revue chaque secteur (transports, supply chain, agriculture, énergie, économie circulaire, services…), il montre comment l’intelligence artificielle permet de gagner en efficacité énergétique, d’améliorer les cycles de maintenance, de produire moins et mieux, bref de réduire fortement nos impacts environnementaux négatifs.
Au-delà, il souligne que, si nous allons nécessairement consommer moins, il existe un chemin pour le faire qui améliore notre qualité de vie, au travers d’une modification profonde de nos usages. Nos façons de voyager, de travailler, de nous loger, de consommer pourraient s’en trouver révolutionnées. Au point de marquer notre entrée dans une nouvelle ère ?
Gilles Babinet, entrepreneur à succès dans le domaine des nouvelles technologies, copréside le Conseil national du numérique. Il est le cofondateur de Urbantech Ventures, un fonds de capital-risque dédié aux enjeux de l’intelligence artificielle et de l’environnement dans le domaine des infrastructures. Il est le « digital champion » de la France auprès de la Commission européenne. Il enseigne à l’Institut national du service public (INSP) et à HEC.
. L’homme diminué par l’IA, de Marius Bertolucci, Éditions Hermann
L’intelligence artificielle derrière nos écrans est devenue omniprésente. Ses capacités progressent à un rythme exponentiel dans des domaines que l’on croyait autrefois réservés aux humains, comme l’art, le langage, les relations interpersonnelles ou la science. Les innombrables IA, telles que ChatGPT, DALL-E 2 ou Midjourney, qui sont accessibles au grand public, mettent en lumière les défis d’une cohabitation incessante avec des algorithmes. En sortons-nous indemnes ? L’homme, qui rêvait de se voir « augmenté » grâce à la technique et de s’affranchir des limites liées aux contraintes biologiques, découvre qu’il risque en réalité d’être assujetti à la condition de cybcog (cybernetic cognition), un être dépendant et piloté par l’IA. Les études sont unanimes : notre exposition constante aux IA diminue nos capacités à créer, à apprendre et à penser, altère nos liens sociaux et notre autonomie.
Cet essai, qui tient compte des innovations et des recherches les plus récentes, nous informe sur les potentialités extraordinaires comme sur les dangers de l’IA, et plaide pour un encadrement strict de ses usages.
Marius Bertolucci est maître de conférences en sciences de gestion, spécialisé en gestion publique au sein de l’Institut de management public et gouvernance territoriale (IMPGT) et du laboratoire CERGAM à Aix-Marseille Université. Il est également secrétaire général de la Société de philosophie des sciences de gestion (SPSG).
. Le roman national des marques, de Raphaël Llorca, Éditions de l’Aube – Fondation Jean Jaurès
Qui, aujourd’hui, raconte la France ? Plus personne, répondent les Français, qui ne cessent de reprocher aux politiques leur incapacité à porter un discours cohérent et articulé sur ce qui travaille le pays en profondeur : ses idéaux, ses valeurs, sa sensibilité, mais aussi ce qui nous divise et ce qui nous rassemble encore (voir l’interview de Frédéric Micheau d’Opinion Way)
Cette défaillance narrative, au cœur du malaise français, ouvre l’espace à de nouveaux conteurs, souvent négligés lorsqu’il s’agit d’analyser la société française contemporaine : les marques commerciales. L’idée forte de ce livre, c’est que les prises de parole des Renault, SNCF et autres McDonald’s influencent subrepticement la manière dont nous nous représentons collectivement la France et les Français. Pour mesurer l’effet de ce « roman national des marques » sur le paysage mental contemporain, l’auteur emprunte aussi bien aux sciences de la communication qu’à la sémiologie, à la sociologie ou à la théorie littéraire, et investit la dimension du symbolique et des représentations pour esquisser les contours de ce nouvel imaginaire politique.
Raphaël LLorca est communicant, codirecteur de l’Observatoire « Marques, imaginaires de consommation et Politique » à la Fondation Jean-Jaurès. Il est l’auteur, chez le même éditeur, de La marque Macron (2021) et de Les nouveaux masques de l’extrême droite (2022).
. Et si…on libérait notre imagination, de Rob Hopkins, Éditions Babel
L’imagination, c’est cette capacité de dire “Et si…” et d’envisager un autre monde en cohérence avec nos besoins et nos aspirations. Rob Hopkins nous invite ici à la remettre au cœur de nos vies et à rêver en plus grand.
Le cofondateur du mouvement des Villes en transition rend compte d’initiatives couronnées de succès partout sur la planète, en commençant par sa petite ville de Totnes en Angleterre, où la communauté est devenue le moteur d’une véritable innovation sociale et envi ronnementale.
En ces temps de catastrophes climatiques, de perte de biodiversité, d’insécurité alimentaire et de crises politiques, cet appel à libérer notre imagination collective laisse entrevoir une vigueur nouvelle pour les enjeux de demain. Et si on commençait dès aujourd’hui ?
Rob Hopkins est enseignant britannique en permaculture, initiateur du mouvement international des villes en transition. Il est l’auteur de plusieurs ouvrages importants sur ce sujet : « Manuel de transition. De la dépendance au pétrole à la résilience locale » (Écosociété, 2010), « Ils changent le monde ! 1001 initiatives de transition écologique » (Seuil, 2014), « Le Pouvoir d’agir ensemble, ici et maintenant », avec Lionel Astruc (Actes Sud, 2015). Il est sans doute l’un des activistes écologiques anglo-saxons qui a eu le plus d’influence ces dernières années.
Et quelques romans choisis par Christelle Grelou, Directrice de clientèle à l’agence mais aussi blogueuse lecture suivie par plus de 10K followers sur Instagram :
. Terres promises de Bénédicte Dupré Latour (Les Editions du Panseur)
Terres promises est un premier roman foisonnant et passionnant. Bénédicte Dupré La Tour y met en scène huit personnages avec pour toile de fond la conquête de l’Ouest, ce moment où la quête de l’or rendit les hommes fous. Eleanor, Rebecca, Kinta, Bloody Horse, Mary, Nathaniel… tous ces destins vont se croiser et s’entremêler pour former une intrigue dense et haletante. Des vies intimes qui vont se heurter à l’histoire des Etats-Unis du XIXème siècle.
Ce roman choral a des petits airs de western et surtout son auteure possède un style riche et cette capacité, qui n’est pas donnée à tous, de faire éprouver au lecteur tout ce que ses personnages ressentent. Un roman brillant et un véritable coup de cœur de la rentrée littéraire.
. La petite bonne de Bérénice Pichat (Editions Les Avrils)
Elle est au service des autres. Elle nettoie leurs sols, leur linge, leur vaisselle. Elle entre dans leur intimité sans que personne ne la remarque. Elle vit avec un homme qui a la tendresse un peu brusque. On ne connait pas son nom. Parmi les personnes chez qui elle fait le ménage, il y a Alexandrine et Blaise Daniel. Blaise est revenu de la première guerre mondiale sans ses jambes, sans ses mains, avec une moitié de visage. Depuis, sa femme, Alexandrine, veille sur lui. Ils vivent comme deux ombres, repliés sur leurs douleurs et leurs solitudes. Exceptionnellement, Alexandrine a accepté de passer quelques jours à la campagne chez des amis, laissant Blaise sous la garde de la bonne. Quelques jours qui vont tout changer.
Un roman comme un pur concentré d’émotions et qui joue aussi avec une forme différente du roman classique puisque Bérénice Pichat a choisi d’alterner les vers libres lorsqu’elle évoque la petite bonne et la prose pour les personnages d’Alexandrine et Blaise. C’est un récit sublime et une nouvelle belle révélation de la rentrée littéraire 2024.
. Comment j’ai retrouvé Xavier Dupont de Ligonnès de Romain Puértolas (Editions Albin Michel)
Imaginez : vous êtes tranquillement sur votre terrasse, quelque part au cœur de l’Ariège et, dans l’homme assis sur celle d’à côté, lisant son journal et buvant son café, il vous semble reconnaître Xavier Dupont de Ligonnès. C’est ce qui arrive au narrateur de ce roman qu’on découvre, dès les premières pages, devant le tribunal de Toulouse, accusé d’avoir tué Xavier Dupont de Ligonnès de… 94 coups de couteau à beurre !
Ancien capitaine de police, Romain Puértolas avoue être hanté par cette affaire non résolue. Au point d’avoir mené sa propre enquête qu’il nous relate dans ce livre qu’on ne lâche pas avant la dernière page. C’est plein de trouvailles ingénieuses mais aussi de révélations sur la manière dont l’enquête a été menée et dont elle continue d’être menée par la police. Le retournement final est aussi très réussi.
. Chasse au trésor de Molly Keane (Editions La Table Ronde)
La fin de la seconde guerre mondiale est encore récente et les proches de Roderick Ryall sont réunis au domaine de Ballyroden, en Irlande, pour assister à ses obsèques et prendre connaissance du testament. Il y a son fils, Phillip, son frère, Hercules, sa sœur Consuelo, la fille de celle-ci Veronica et Tante Anna Rose. Les trois domestiques sont aussi présents. Et l’évidence s’impose bientôt : la famille est ruinée. Pour espérer faire entrer un peu d’argent et entretenir un domaine qui part en ruines, Phillip et Veronica prennent la décision de transformer le château en maison d’hôtes. Et les premiers à tenter l’expérience sont trois londoniens fortunés. Mais le séjour va se révéler plein de surprises, pas toutes agréables !
Nous sommes ici sur un roman écrit en 1952 et réédité en France en 2014, mais même s’il n’est pas récent, il vaut le détour ! C’est un récit éminemment drôle qui met en scène des personnages totalement décalés en prise avec des situations toutes plus loufoques les unes que les autres. L’intrigue est menée tambour battant par une Molly Keane qui s’amuse visiblement autant que son lecteur et on ne s’ennuie pas une seule seconde.